"Le travail de ce monde est toujours accompli par des créatures trop fatiguées pour le faire."
La Monture est un roman dystopique de Carol Emshwiller édité par Argyll. Traduit pour la première fois en français cette année par Patrick Dechesne, il est paru en 2002 en VO. Ce roman a reçu le Prix P. K. Dick en 2003.
La couverture de Xavier Collette est parfaite, très dérangeante !
Sur une Terre devenue leur monde d'accueil, les Hoots, des extraterrestres herbivores, ont transformé les humains en montures privilégiées. Charley, jeune garçon sélectionné pour ses mensurations et ses capacités reproductives, est destiné à devenir celle d'un grand dirigeant. Cependant, sa rencontre avec Heron, son père, réfugié dans les montagnes, bouleverse ses certitudes et sa destinée.
👉 Mêlant dystopie et une forme de nature writing, La Monture est un roman étonnant, à l'écriture faussement naïve. L'autrice y parle des rapports de domination et de la façon dont nous les intégrons.
Comme je le disais plus haut, je trouve la couverture de Xavier Collette délicieusement dérangeante : c'est elle qui m'a donné envie de découvrir le roman !
Les humains ont été asservis par les Hoots. Ils sont devenus leurs montures, et sont dressés et exhibés tels des chevaux par ces extraterrestres aux jambes trop faibles pour se déplacer seuls sur Terre. Ils sont même classés par race, notamment les forts Seattle ou les rapides Tennessee.
Le premier chapitre est narré par un Hoot, il donne au lecteur le point de vue des dominants. Ils persuadent leurs montures qu'ils sont gentils, aidants et indispensables à leur survie, alors même que c'est l'inverse : ce sont bien les montures qui permettent aux Hoots de survivre sur Terre.
Ensuite, c'est Charley, jeune garçon de 11 ans, qui prend le relais. Il est destiné et entrainé depuis petit à être la monture de Son-Excellence-Vouée-A-Devenir-Notre-Maître-A-Tous, lui aussi très jeune. Mais Charley est libéré par son père qu'il n'avait jamais rencontré et qui vit dans les montagnes avec d'autres rebelles, ce qui ne lui plait pas vraiment... Il a en effet très bien intégré sa position de serviteur et n'y voit aucun problème ! Il sauve en passant son Petit-Maître Hoot avec qui il a une relation très forte, contre l'avis des autres humains.
La relation entre Charley et son Petit-Maître est effectivement centrale dans le récit. Au-delà de la critique du rapport dominant-dominé, l'autrice pointe que l'éducation est primordiale, elle forge la personnalité. Charley et le Hoot sont coincés chacun dans leur carcan, sauf que la vie dans la montagne, avec des humains libres, va les faire évoluer chacun à leur façon, manière de dire qu'on peut s'éduquer et changer tout au long de la vie !
Au rang des "reproches", j'ai trouvé un peu poussif le fait que Charley, garçon de 11 ans plutôt naïf, ait parfois des pensées vraiment trop pertinentes pour son âge. Mais sa relation avec son père, ainsi que son évolution tout au long de l'histoire sont passionnantes.
Pour résumer, j'ai vraiment apprécié la balade, notamment toute la réflexion autour de la domination qui résonne énormément. Malaisant à souhait. J'ai également beaucoup aimé la nature américaine, les descriptions de la montagne, j'avais l'impression d'y être ! Retrouvez La Monture de Carol Emshwiller chez Argyll Éditions !
La Monture
de Carol Emshwiller
Argyll Editions - Octobre 2021
224 pages
Traduit de l'américain par Patrick Dechesne
Couverture de Xavier Collette
Papier : 19,90€ / Numérique : 9,99€
Titre original : The Mount - 2002
Dit comme cela, la Monture devient tentante, et donne envie de s'y lancer.
RépondreSupprimerC'est une expérience !
SupprimerIntéressant, à l'occasion peut-être...
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