dimanche 14 septembre 2014

Fantômes : Histoires troubles de Joe Hill

Fantômes : Histoires troubles de Joe Hill a été réédité en poche début 2014 chez J'ai Lu, j'ai donc sauté sur l'occasion pour l'acquérir, ayant plutôt apprécié mes lectures précédentes de l'auteur (Cornes, Locke & Key, The Cape, Nosfera2). Je voulais le découvrir sur le format court.

Imogene est jeune et belle. Elle embrasse comme une star et connaît l'histoire du cinéma sur le bout des doigts. Elle est morte et attend Alec Sheldon, dans la salle de projection le Rosebud, un certain après-midi de 1945... Arthur Roth est un gosse solitaire qui a de grandes idées et le don de s'attirer des ennuis. Il n'est pas facile de se faire des amis quand on est le seul garçon en plastique gonflable de la ville... Francis est malheureux. Autrefois humain, c'est aujourd'hui une sauterelle géante de deux mètres cinquante, et quand ils l'entendront stridulèr, tous les habitants de Calliphora se mettront à trembler... John Finney est enfermé dans un sous-sol taché du sang des autres enfants martyrs qui l'y ont précédé. Dans ce sous-sol se trouve aussi un téléphone ancien modèle débranché depuis longtemps. Pourtant, la nuit, il se met à sonner... Qui est à l'appareil ? Le passé n'est pas mort. Il est encore à venir... 

Les textes de ce recueil font entre généralement 20 et 30 pages, et entrent dans la catégorie fantastique/horrifique. Nombre d'entre eux tournent autour de la figure du père. Tous se déroulent au XXème siècle.

Poésie et horreur se côtoient, ainsi que de nombreuses références littéraires : Lovecraft, Kafka, Golding, Gaiman, Finney... et cinématographiques : Hitchcock, Spielberg, Romero...

De minimes soucis de traduction sont présents, par exemple : Le Seigneur des Mouches à la place de Sa Majesté des Mouches, ça m'a dérangée pour un classique.

Une partie des textes est percutante :
  • Dernier cri est la première nouvelle. Elle traite à la fois du métier d'éditeur et du texte court : son écriture, comment il doit se tourner, et le twist de fin. Ajoutez-y un soupçon de Massacre à la tronçonneuse. Bonne ouverture, qui m'a parfois fait penser à Rêves captifs de Lisa Tuttle, et qui a reçu les prix Bram Stoker et British Fantasy de la nouvelle.
  • Pop Art demande une suspension d'incrédulité assez énorme. En effet, de rares personnes ont une maladie étrange : elles sont en plastique gonflable, en gros ce sont des poupées vivantes. Pas d'organes, elles ne respirent pas et sont très fragiles. J'ai vraiment aimé l'idée, la poésie et le titre plein d'humour noir de ce texte, le gars malade en question s'appelant Art.
  • La Cape a été adaptée en comics, et je l'ai chroniquée ici. C'est l'histoire d'un jeune garçon dont le doudou était une couverture, qui a ensuite été transformée en cape par sa mère quand il a grandi. Un jour il grimpe dans un arbre avec sa cape autour du cou et glisse. Avant de perdre sa cape, chuter et s'empaler sur une branche au sol, il flotte quelques instants dans l'air sous l’œil médusé de son frère... Tous les super-héros ne sont pas des gentils. Un texte noir de chez noir.
  • Le Masque de papa est un texte dérangeant, angoissant, un genre d'Alice au Pays des Merveilles tordu, et qui finit mal, bref une réussite ! 
  • Escamotage est la plus longue nouvelle du recueil. Elle tape dans le mille, Stephen King style, et a reçu le World Fantasy award en catégorie novella (je l'ai trouvée un peu courte pour être classée novella cela dit - 60 pages). Une lecture tout à fait recommandable.
Une autre partie me semble inaboutie et dispensable :
  • Mieux qu'à la maison a deux thèmes principaux, l'un qui m'a intéressée : le handicap léger d'un enfant, l'autre qui m'a saoulée : le base-ball... Généralement quand je lis une histoire autour du base-ball, je lis "blablablablabla base-ball blablabla base-ball...". Dommage car la relation entre le père et l'enfant est vraiment belle.
  • Le Téléphone noir fait partie des nouvelles prometteuses mais pourtant inabouties. Un ado est enlevé par un homme et enfermé dans une cave. Dans cette cave, un vieux téléphone noir, même pas branché, mais qui sonne. Cela aurait pu être un récit bien flippant, mais je l'ai trouvé raté.
  • Dans la souricière est encore pire. Sûrement une référence à la pièce d'Agatha Christie, elle n'est pas assez approfondie, même si elle est angoissante.
  • Bois mort, deux pages, un peu de poésie, pas vraiment d'intérêt.
  • Un petit déjeuner : inaboutie au possible, cette nouvelle était sûrement un prémisse au premier roman de Joe Hill, Le Costume du mort. Il y avait des possibilités, peut-être les a-t-il exploitées dans le roman.
  • Scheherazade a encore frappé : cachée dans les remerciements, déjà vu et sans grand intérêt, possible qu'on y trouve des private jokes.
Et puis il y a toujours les entre-deux :
  • La Belle au ciné hantant : Dans un cinéma, certains spectateurs affirment avoir parlé à une femme fantôme. Le directeur sait que certains mentent, mais d'autres disent vrai... Une belle histoire, mais également effrayante. Jolie fin.
  • Dans Stridulations, Hill imagine une variation de La Métamorphose de Kafka. 
  • Fils d'Abraham : Et si Van Helsing était juste un père abusif et dérangé ?
  • Dernier souffle raconte l'histoire d'un vieil homme qui collectionne les derniers souffles des personnes dans des bocaux fermés hermétiquement et fait visiter son musée (et donc écouter les derniers souffles)
  • Bobby Conroy revient d'entre les morts n'a rien du genre fantastique. Cependant, le texte évoque le tournage de Dawn of the dead, et invite Romero dans ses lignes. On y suit des figurants zombies sur le tournage. Hill imagine les retrouvailles d'un homme et de son ancienne petite amie du lycée, maintenant mariée à un loser et mère de famille.

Pour résumer, Fantômes : Histoires troubles de Joe Hill réédité en poche début 2014 chez J'ai Lu s'intitulait avant Fantômes du XXème siècle, ce qui lui allait très bien, et précisait le propos de l'auteur. Ce recueil est passable : certaines nouvelles sont bonnes, ou prometteuses, d'autres sans intérêt. On sent le bon auteur en devenir, mais il y avait encore du travail pour arriver aux romans et BD qu'il peut produire maintenant. Je m'explique assez mal les prix reçus pour l'ensemble du recueil (Prix Bram Stoker et British Fantasy en 2006), mais comprends ceux décernés à deux de mes nouvelles favorites. Si vous voulez lire d'excellents textes courts fantastiques/horrifiques, penchez-vous plutôt sur les recueils du père de Joe Hill (Stephen King), sur l'éternel Ray Bradbury ou encore sur l’œuvre de Lisa Tuttle pour ne citer qu'eux !

http://unpapillondanslalune.blogspot.fr/2013/12/jlnn-on-continue.html

D'autres livres de Joe Hill sur le blog.

Fantômes : Histoires troubles
de Joe Hill
J'ai Lu - collection Fantastique en poche - janvier 2014
JC Lattès - 2010 (Fantômes du XXème siècle)
414 pages
Traduit de l'américain par Valérie Rosier
Disponible en papier et numérique
8€ / 14,99€ (pas de version numérique "poche")
Titre original : 20th century ghosts - 2005

3 commentaires:

  1. Tout à fait d'accord avec toi sur le fait que ce recueil soit passable. Depuis cette lecture, je fuis Joe Hill comme la peste mais j'espère qu'il en sera autrement quand je lirai les Locke & Key...

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    1. J'ai été déçue, cela dit ce sont des textes qui datent maintenant de 8 ans, donc n'hésite pas à lire d'autres titres de Joe Hill pour retester ;-)

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