Shining in the dark - anthologie de nouvelles

"Aujourd'hui j'ai souhaité une pandémie. Pas un truc comme la grippe, qui met longtemps avant de se répandre d'une manière efficace. Non, j'ai demandé une maladie du style Ebola sous stéroïdes. Quelque chose qui se répandrait comme un feu de forêt, qui engloutirait le monde."

 

Shining in the dark est une anthologie de nouvelles fantastiques ou effrayantes publiée chez ActuSF. Réunissant certains maîtres du genre, cet ouvrage a été initié par un site de référence sur l’œuvre de Stephen King, à l'occasion de ses 20 ans d'existence.

À l’occasion des vingt ans de Lilja’s Library, l’un des sites de référence sur l’œuvre de Stephen King, son responsable, Hans-Åke Lilja, a fait appel à la fine fleur de la littérature fantastique mondiale pour composer cette anthologie. Du King lui-même – avec un texte inédit en français – à Jack Ketchum, en passant par Clive Barker, John Ajvide Lindqvist ou Ramsey Campbell, vous trouverez dans ces pages de quoi alimenter quelques belles nuits cauchemardesques…

Derrière cette magnifique couverture dorée à l'effet texturé, se cachent des nouvelles qui m'ont plus ou moins convaincue.

LA PIÈCE MAÎTRESSE - OU PAS

La pièce maîtresse de ce livre se veut être la nouvelle de Stephen King intitulée Le Compresseur bleu : un récit horrifique (1971). Il nous offre une véritable expérience, presque une performance (du point de vue artistique) en s'adressant directement au lecteur en tant qu'auteur. Cette courte nouvelle contient donc trois niveaux : 

1. L'histoire d'un auteur, Gerald Nately, qui rencontre une femme énorme, Mme Leighton, et décide d'écrire sur elle sans le lui avouer, 
2. Combinée aux pensées de Gerald (en italique) qui juge et se moque de Mme Leighton, les trucs les plus moches qu'on puisse imaginer, 
3. Et entre deux Stephen King qui parle au lecteur et raconte comment lui sont venues les idées pour cette nouvelle. 

Le tout en 15 pages. J'ai été assez peu touchée, m'attendant à être vraiment effrayée... Et en fait rien ou presque. C'est intéressant, pensé, construit, mais niveau zéro de la frayeur. King y fait cependant allusion au Cœur révélateur (1843) de Poe, que l'anthologiste a judicieusement placé un peu plus loin dans le livre : un classique sur la culpabilité.

DE DÉCEPTIONS EN LUEURS D'ESPOIR

S’enchaînent ensuite les nouvelles de Ketchum et Cacek Le Réseau (2006) - un dialogue de tchat entre un homme et une femme dont on sait que ça finira mal, rien de fantastique, et rien de bien inquiétant car assez prévisible, mais je crois que Gromovar a aimé et il a certainement une bonne raison - et de Stewart O'Nan Le Roman de l'Holocauste (2006) - l'histoire d'un personnage appelé Le Roman de l'Holocauste à laquelle j'avoue n'avoir pas compris grand chose - et j'ai commencé à me dire que je n'avais vraiment pas peur, à part de m'ennuyer. 

Est venue la nouvelle Aeliana de Bev Vincent (2017) qui ne m'a pas non plus fichu la trouille, mais qui a le mérite d'être parfaitement digeste, légèrement inquiétante, du fantastique avec des créatures de la nuit. Ouf ! Le texte Charabia et Theresa (1993) de Clive Barker amène un peu de fraîcheur (à sa façon, avec des anges et de la merde, bah ouais).

OUUUH J'AI PEUR

La danse du cimetière de Richard Chizmar (1992) se passe dans un cimetière en pleine tempête. Un décor et un récit sombre et court adaptés à la promesse de cette anthologie. 

La plus longue nouvelle de l'anthologie est aussi l'une des plus effrayantes. L'Attraction des flammes (2017) est signée par Kevin Quigley : trois jeunes pré-ados fuguent pour pouvoir visiter Le Monde de la peur, un parc d'attraction éphémère pour le mois d'octobre, qui présente pas moins de 5 maisons hantées ! Ils y sont accueillis par l'inquiétant M. LaRue et les pauvres sont vraiment très mal barrés.

Le texte suivant se passe aussi dans une fête foraine, il est intrigant et la fin est saisissante, c'est Le Compagnon de Ramsey Campbell (1976). 

L'amour d'une mère de Brian James Freeman (2017) est une nouvelle à chute plutôt bien fichue !

Nous avons aussi droit à une Lovecrafterie plutôt réussie de la part de John Ajvide Lindqvist, un effrayant développement autour du jeu de rôle L'Appel de Cthulhu qui s'intitule Le Manuel du gardien (2017).

"Le garçon était-il réellement capable d'invoquer des horreurs cosmiques ou était-il en train de devenir fou ?"

LA CLAQUE : LA FIN DE TOUTES CHOSES

La fin de toutes choses (2017) est une nouvelle bouleversante de Brian Keene qui parle d'une certaine hantise, de l'esprit qui se délite après la mort de proches (précisément ici d'un enfant). Chaque jour ce père souhaite une nouvelle fin du monde pour cesser de souffrir, et chaque jour elle n'arrive pas. C'est effectivement un vrai cauchemar, LE cauchemar que vit cet homme. Magnifique texte qui joue sur ma plus grande peur, la plus réelle qui soit.

"Il avait sept ans à l'époque, et il croyait encore au Père Noël. Quatre mois plus tard, il m'a demandé s'il existait, et je lui ai demandé ce qu'il en pensait - il ne savait pas trop. Il est parti maintenant. Il est parti, et je ne saurai jamais s'il a compris ou pas."

Au final les nouvelles de cette anthologie sont intéressantes, et pas mauvaises. Je crois que ma déception à la lecture de certaines d'entre elles vient du fait qu'on m'a vendu du rêve, enfin du cauchemar plus précisément, et que la promesse n'est pas tenue. C'est généralement le problème des anthologies : la qualité des textes est inégale. Toutefois, j'ai aussi lu d'excellents récits, effrayants ou percutants, et ai apprécié le petit laïus de chaque auteur (enfin les vivants) à la fin de l'ouvrage pour aller un peu plus loin dans l'explication de sa nouvelle. Malgré quelques gros bémols, je ne regrette pas de m'être plongée dans Shining in the dark !

L'avis de Célindanaë, Gromovar

Shining in the dark
Anthologie
ActuSF - Octobre 2020
350 pages
Traducteurices multiples, comme les auteurs !
Papier : 21,90€ / Numérique : 9,99€
Titre original : Shining in the dark - 2018