jeudi 25 août 2016

☆ L'Homme qui mit fin à l'histoire de Ken Liu

L'Homme qui mit fin à l'histoire est une novella de Ken Liu publié dans la jeune et excellente collection Une Heure-Lumière du Bélial'. Après l'inoubliable Ménagerie de papier, il était impossible de passer à côté de ce texte, finaliste du Hugo en 2012 ! Encore une fois, l'auteur nous propose un récit de science-fiction poignant et instructif.

Futur proche.
Deux scientifiques mettent au point un procédé révolutionnaire permettant de retourner dans le passé. Une seule et unique fois par période visitée, pour une seule et unique personne, et sans aucune possibilité pour l'observateur d'interférer avec l'objet de son observation. Une révolution qui promet la vérité sur les périodes les plus obscures de l'histoire humaine. Plus de mensonges. Plus de secrets d'État.
Créée en 1932 sous mandat impérial japonais, dirigée par le général Shiro Ishii, l'Unité 731 se livra à l'expérimentation humaine à grande échelle dans la province chinoise du Mandchoukouo, entre 1936 et 1945, provoquant la mort de près d'un demi-million de personnes… L'Unité 731, à peine reconnue par le gouvernement japonais en 2002, passée sous silence par les forces d'occupation américaines pendant des années, est la première cible de cette invention révolutionnaire. La vérité à tout prix. Quitte à mettre fin à l'Histoire.
 
L'Homme qui mit fin à l'histoire est une claque.

Dans un futur proche, un couple composé d'une scientifique nippo-américaine et d'un historien sino-américain a trouvé le moyen de voyager dans le temps, en utilisant les photons. Le problème est que quand une personne visite un point précis du temps, il devient ensuite impossible d'y retourner : le moment devient inaccessible. Cela soulève rapidement de nombreuses questions, d'autant que la période et le lieu qu'il est prévu de rejoindre sont plus que sensibles : Pingfang en Chine, pendant la Seconde Guerre Mondiale, où était implantée une unité militaire japonaise qui a pratiqué des expériences sur des humains, telles que des vivisections et bien d'autres horreurs...

Les dilemmes principaux sont les suivants : Faut-il aller déterrer cet horrible passé dans le contexte géopolitique qui est celui de ce futur proche ? (Certains pourraient en être bien embarrassés, et pas seulement les japonais). Faut-il y envoyer des historiens afin d'observer les faits, ou les familles des personnes disparues dans ce camp de la mort afin qu'elles sachent enfin ce qui est arrivé à leurs proches ?

Ce texte sous forme de "film documentaire" (avec des témoignages et documents divers) possède deux facettes ingénieusement combinées. D'un côté, la science-fiction, avec l'idée de voyager dans le temps grâce aux photons, et la contrainte supplémentaire que tout moment ne pourra être visité qu'une seule et unique fois. Il y a une sorte de vertige quand le procédé est décrit. 

De l'autre, c'est toute une passionnante interrogation autour de l'Histoire. Combien d’États n'ont jamais reconnu certaines atrocités commises ? (Probablement la plupart...) Le Japon n'a reconnu qu'en 2002 l'existence de l'Unité 731 (je déconseille aux âmes sensibles de lire l'article Wikipédia, quand on dit atrocités, c'est vraiment l'horreur). Lire le texte de Ken Liu est assurément une épreuve mais cela permet à l'auteur de nous ouvrir les yeux et de nous proposer des questionnements sur l'Histoire, les gouvernements, les manipulations, le négationnisme...

Pour résumer, L'Homme qui mit fin à l'histoire de Ken Liu chez Le Bélial' est tout ce que j'aime en SF : un récit intelligent, qui sert non seulement un certain plaisir de lecture (malgré son sujet grave, excellemment traité) mais aussi et surtout le développement de réflexions plus profondes sur l'humanité. Les racines sont importantes pour l'auteur (on le sait depuis la sublime nouvelle La Ménagerie de papier) et c'est aussi de cela dont il est question ici : regarder le passé en face pour mieux appréhender le présent et l'avenir. Une novella à lire.


Nébal et Just a word en parlent (très bien comme d 'hab)

L'Homme qui mit fin à l'histoire 
de Ken Liu
Le Bélial' - Une Heure-Lumière - Août 2016
112 pages
Traduit de l'américain par Pierre-Paul Durastanti
Papier : 8,90€ / Numérique : 3,99€
Titre original : The Man who ended history : a documentary - 2011

4 commentaires:

  1. Tout le monde semble d'accord.
    Si avec ça et "La ménagerie de papier", le monde de l'édition francophone n'ouvre pas grand les bras aux futurs textes de Ken Liu, je ne comprends plus...

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    1. C'est déjà le cas apparemment ;-) The Grace of Kings serait prévu chez Fleuve éditions.

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  2. J'ai hâte de le lire celui-là...

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