vendredi 8 mars 2013

Les Avenirs d'Hafid Aggoune

Le pitch :
Pendant près de soixante ans, Pierre Argan a vécu absent à lui-même, sur l’île de Luz où il a été interné. Mais ce matin de septembre, le vieil homme se réveille. Il remonte alors le cours de sa vie, se souvient peu à peu de son enfance, de son premier amour Margot... et de cette journée d’automne, en 1942, où tout a basculé.

Mon avis :
Storylab propose aux participants du JLNN de découvrir ce premier roman d'Hafid Aggoune, Les Avenirs, publié dans une version revue et corrigée. Il a reçu le Prix de l'Armitière et le Prix Félix Fénéon.

C'est le côté mystérieux du résumé qui a attiré mon attention, ce livre ne rentrant a priori pas dans mes goûts habituels. J'avoue que l'incipit a achevé de me convaincre d'aller au bout de ma lecture :

"Un jour, j'avais dix-sept ans, j'ai disparu de moi."

Paf, et voilà, ma lecture était lancée pour 64 pages d'émotion et de réflexion. J'ai pleuré page 14. 


Pierre Argan nous raconte son éveil dans un hôpital psychiatrique, 60 ans après un événement traumatisant. En effet, à 17 ans, il a brusquement cessé de parler et même de percevoir le monde qui l'entourait. Son seul lien avec le réel : un banc, sur lequel il attend le retour du train qui a emporté Margot en 1942. Son seul plaisir : regarder un peintre pratiquer son art sur des toiles imaginaires. Et puis aussi écouter la mer.

On est vraiment loin de mes lectures habituelles et pourtant j'ai pris un grand plaisir à lire cette novella pleine de poésie, de métaphores, qui nous parle de la perte, de l'amour, de l'art... 

L'hôpital se trouve sur un île, Luz (la lumière !), et pour moi c'est tout simplement une métaphore du narrateur lui-même : il est une île, inaccessible, singulier, perdu en lui-même.

"J'ai hurlé tous mes silences."

Ce texte m'a parfois remué les tripes, notamment les passages sur l'enfance et l'arrachement à la mère. Le retour à la vie de cet homme qui rejette simplement l'inacceptable est décrit de manière poétique et juste.

"Laisser un enfant de deux ans partir seul loin de soi, ne plus le voir, ne plus être là quand il dort, quand il joue, quand il a froid, quand il pleure ou quand il rit, quand il a peur du noir, ne pas le voir grandir, même deux jours, c'est comme un décès sans que le corps ne soit jamais rendu."

Petit bémol, une critique glissée là, un peu facile, de la télévision, cet écran sans âme qui nous projette des images dont on se fout et nous abrutit. Allez, c'est un peu extrême, et plutôt anecdotique, mais on peut comprendre cette sensation du narrateur face à cette boîte qui ne lui parle que de morts et devant laquelle dépérissent les autres patients de l'asile. Je n'adhère pas totalement cependant.

Pour résumer, Hafid Aggoune nous offre une novella poignante, rapide à lire, qui devrait vous remuer les tripes à quelques passages et vous faire réfléchir sur la vie. Une belle découverte hors de mon sujet habituel !


Lecture n°19 dans le cadre
du challenge Je lis des nouvelles et des novellas

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