vendredi 29 mai 2015

Les Dames blanches de Pierre Bordage

Les Dames blanches est le dernier roman de Pierre Bordage paru chez L'Atalante. Il a le mérite d'avoir un pitch original et bien SF, qui m'a donné envie de m'y pencher après ma déception sur le (trop) attendu Chroniques des Ombres.

Une étrange bulle blanche d’une cinquantaine de mètres de diamètre est découverte un jour dans une bourgade de l’ouest de la France. Elle attire et capture Léo, trois ans, le fils d’Élodie. D’autres bulles apparaissent, grossissent, et l’humanité échoue à les détruire. Leur activité magnétique de plus en plus importante perturbe les réseaux électriques et numériques, entraînant une régression technologique sans précédent.Seule l’« absorption » de jeunes enfants semble ralentir leur expansion…La peur de disparaître poussera-t-elle l’humanité à promulguer la loi d’Isaac ? Mais peut-on élever un enfant en sachant qu’il vous sera arraché à ses trois ans ? Camille, qui a elle-même perdu un fils, et son ami Basile, d’origine malienne – ufologue de son état – vont essayer de percer le mystère des dames blanches afin d’éviter le retour à la barbarie.

Enfin ! J'attendais un nouveau Bordage avec impatience, parce que j'adore cet auteur, mais aussi parce que j'avais été déçue par son dernier roman, Chroniques des Ombres. J'ai été happée dès les premières pages par Les Dames blanches.

Enfin ! Bordage se renouvelle, tout du moins au niveau de l'intrigue. Car pour ce qui est des convictions, l'auteur est égal à lui-même : il combat les fanatismes de toutes sortes, et ça me convient parfaitement.

Côté pitch, des sphères blanches apparaissent un peu partout dans le monde. Elles attirent des enfants de moins de 4 ans, qu'on ne revoit jamais. Les gouvernements vont essayer de les détruire par tous les moyens. L'humanité, réagissant d'une façon démesurée face à l'inconnu, à l'inexplicable, va alors s'engager dans une période totalement folle et dystopique.

Bordage nous touche au cœur dans ce roman. Car il "s'en prend" aux enfants. Les tout petits, ceux dont on sait qu'ils ne peuvent se défendre, ceux dont on a la responsabilité... Ils vont devenir un enjeu crucial incroyable, devenir des armes de guerre. Pour moi c'est de la folie, la folie des hommes dont parle l'auteur. Mon fils allant sur ses trois ans, vous imaginez bien que je ne suis pas restée insensible à l'histoire... 

L'échelle de temps de ce roman est intéressante. Elle se déroule sur des dizaines d'années. C'est intelligent de la part de l'auteur, car de cette manière, il peut montrer l'embrigadement des plus jeunes, ceux qui n'ont connu que le monde avec les Dames blanches, comme il est facile à des gens malintentionnés de les modeler, de leur faire penser que ce qui arrive est nécessaire.

Bordage utilise également des mythes anciens pour construire son intrigue, notamment l'histoire d'Isaac, qui devait être sacrifié par son père en tant que premier enfant. D'ailleurs l'utilisation de cette légende par les gouvernements pour le nom de leur loi est erronée, puisqu'Abraham n'a jamais sacrifié son enfant (bon, par contre quelqu'un - un ange - a du lui dire de ne pas le faire...)

Comme souvent chez Bordage on retrouve un personnage de sage, qui réfléchira aux Dames blanches, se posera la question de la communication, chose que les gouvernements ne feront pas. Il reste assez secondaire cependant. Tous les personnages ont des failles, certains peut-être trop, mais en tous les cas, quand Bordage touche à l'enfance et à l'affectif, il sait rendre les sentiments.

Du côté des bémols, au-delà des poncifs presqu'habituels de l'auteur sur les femmes, j'ai été gênée par le traitement de la parentalité. L'arrachement des enfants se fait apparemment toujours à la mère. Il m'a fallu attendre plus des trois quarts du livre pour qu'enfin un père ressente ce sentiment. J'ai trouvé ça long, et injuste, car on arrache un enfant à ses parents, pas seulement à sa mère. Les pères ne sont pas tous des alcooliques dépressifs.

Pour résumer, Les Dames blanches de Pierre Bordage chez L'Atalante marque un renouvellement dans les intrigues de l'auteur. On retrouve évidemment la patte Bordage, mais avec une histoire originale, prenante, que j'ai dévorée en deux jours. L'auteur évoque dans cette dystopie les drames de notre monde, la façon dont les enfants sont pris en otage, soldats malgré eux de guerres insensées. Il a su toucher la corde sensible, et je ne serai sûrement pas la seule à maudire les choix de cette humanité inhumaine. A rapprocher de La Fraternité du Panca, pour le combat contre les fanatismes. Pierre Bordage, forever.

Les Dames blanches
de Pierre Bordage
Editions L'Atalante - mai 2015
384 pages
Papier : 21€ / Numérique : 9,99€

2 commentaires:

  1. Lu 65 pages et pour l'instant j'adore.

    Je reviens lire ta chronique et encore désolé pour le spoil.

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  2. ça se lit très très bien et vite !

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