Le Vivant est un roman dystopique post-humaniste d'Anna Starobinets, paru aux excellentes Éditions Mirobole.
Dans un futur lointain, les humains sont connectés via des implants à un
réseau commun. Ensemble, ils forment un organisme unique, le « Vivant
». La mort n’y existe pas : dès qu’un individu est « mis sur pause »,
son code génétique renaît dans un nouveau corps. Le nombre d’humains est
constant – trois milliards. Le Vivant vacille sur ses bases lorsque l’impensable survient : un homme
naît. Il est sans code, sans patrimoine, il n’est la réincarnation de
personne. On l’appelle Zéro. Placé sous étroite surveillance, il devra
trouver des réponses sur son identité dans un monde réputé parfait…
Dans ce futur, les réseaux sociaux sont intégrés dans la tête des gens. C'est même le principal moyen (et lieu !) d'interaction entre eux. Les utilisateurs parlent de strates. La première strate correspond à la réalité, presque totalement abandonnée au profit des strates suivantes : une strate télévision, une strate réseau, etc... Les humains sont trois milliards, et possèdent chacun un code. Quand ils meurent, ils renaissent dans un autre corps mais avec le même code. Ainsi ils font partie d'une entité qu'on appelle Le Vivant. Mais un jour, un enfant nait sans code, et le monde compte alors trois milliards et un individus. On l'appelle Zéro. Il est considéré par la plupart comme l'Antéchrist (enfin son équivalent selon la religion du Vivant !), par quelques autres comme le Sauveur. Il est vite placé en Maison de Correction, censée traiter et corriger les déviances. Il est suivi en permanence par Ef, un policier.
Je suis mitigée sur ce roman. Malgré ses atouts incontestables, j'ai eu du mal à entrer dedans au départ, du fait de la construction non linéaire qui adopte plusieurs points de vue : des documents récupérés dans un coffre, des tchats, plusieurs personnages... Cependant, je me suis adaptée, et cela s'est révélé plutôt captivant par la suite, car j'ai aimé reconstituer lentement ce monde.
Je n'ai pas beaucoup accroché au personnage principal, Zéro. Le pauvre est déconnecté dans tous les sens du terme, n'ayant pas de code, il ne connait pas la vie dans les autres strates que la première, et ainsi est coupé de tous. Cela le rend ouvert au monde réel et incapable de se représenter la vie des autres humains, mais j'ai trouvé que l'auteure lui avait donné un côté trop naïf, l'empêchant de se défendre et d'avoir un peu de répondant. Il n'est pas idiot mais se fait manipuler trop facilement à mon goût.
Malgré ces bémols, je dois dire qu'Anna Starobinets fait preuve d'une grande maîtrise pour poser son décor virtuel (et réel - dans ce monde abandonné où chacun reste chez soi, les lieux sont apocalyptiques au possible !) et inventer un mode de vie fou, en exagérant une addiction aux réseaux sociaux et un contrôle total par le Pouvoir en place. Par exemple, les noms des couleurs ont changé : vert n'existe plus, c'est devenu... "disponible". D'où "les terrasses disponibles", une expression que j'ai particulièrement appréciée ! De même, la mode est faite par les réseaux, imagine vous porter des vêtements couleur Google, ou avoir un canapé façon Twitter. Tout cela entraine un vocabulaire spécifique qu'utilise l'auteure à bon escient et sans fatiguer son lecteur. Le calendrier est différent du nôtre, puisqu'il commence à l'avènement du Vivant. Les moindres détails du roman sont pensés.
Dystopie quand tu nous tiens ! Les connexions au réseau sont imposées, les esprits contrôlés, la reproduction et la mort programmées, les enfants enlevés à leurs parents et élevés en institut, la pensée et la religion uniques et orientées. Tous les éléments du genre sont présents dans le roman de Starobinets, jusqu'à une police de la pensée très Big Brother, le SOP (Service d'Ordre Planétaire), dont les membres portent des "visages miroir" en permanence.
Malgré ces bémols, je dois dire qu'Anna Starobinets fait preuve d'une grande maîtrise pour poser son décor virtuel (et réel - dans ce monde abandonné où chacun reste chez soi, les lieux sont apocalyptiques au possible !) et inventer un mode de vie fou, en exagérant une addiction aux réseaux sociaux et un contrôle total par le Pouvoir en place. Par exemple, les noms des couleurs ont changé : vert n'existe plus, c'est devenu... "disponible". D'où "les terrasses disponibles", une expression que j'ai particulièrement appréciée ! De même, la mode est faite par les réseaux, imagine vous porter des vêtements couleur Google, ou avoir un canapé façon Twitter. Tout cela entraine un vocabulaire spécifique qu'utilise l'auteure à bon escient et sans fatiguer son lecteur. Le calendrier est différent du nôtre, puisqu'il commence à l'avènement du Vivant. Les moindres détails du roman sont pensés.
Dystopie quand tu nous tiens ! Les connexions au réseau sont imposées, les esprits contrôlés, la reproduction et la mort programmées, les enfants enlevés à leurs parents et élevés en institut, la pensée et la religion uniques et orientées. Tous les éléments du genre sont présents dans le roman de Starobinets, jusqu'à une police de la pensée très Big Brother, le SOP (Service d'Ordre Planétaire), dont les membres portent des "visages miroir" en permanence.
Ce roman post-humaniste est une vive critique de notre société et de nos réseaux sociaux. Starobinets pousse le vice à fond, tout se passe dans les autres strates que la première : les rencontres, les achats, les animaux domestiques (on adopte un chien virtuel, les animaux ne supportant plus les humains modifiés), le sexe pour le plaisir est devenu virtuel également (le logiciel Luxure est impressionnant, à la fois intriguant et horrifiant)... C'est l'occasion pour ce qui sert de gouvernement, Le conseil des Huit, de tout contrôler, orienter, vendre... (Je viens de lire la nouvelle Faits pour être ensemble de Ken Liu, c'est exactement le même thème, mais poussé à son extrême par l'auteure, qui je le rappelle est russe, suivez mon regard, mais ne parlons pas de Poutine...)
Finalement, j'avoue avoir décroché sur la fin, à laquelle je ne m'attendais pas vraiment, et qui ne rend pas Zéro plus intéressant malheureusement. Ses capacités sous-entendues tout le long du roman ne sont pas assez développées, et j'en ai été frustrée.
Pour résumer, Le Vivant d'Anna Starobinets est une dystopie post-humaniste publiée aux Éditions Mirobole. Comme l'on pouvait s'y attendre selon mes goûts, la partie dystopique m'a intéressée et l'humain modifié m'a rapidement lassée. J'ai eu un peu de mal avec la construction non linéaire que j'ai
pourtant tendance à apprécier habituellement, et le héros trop naïf. Cependant, l'auteure fait preuve d'une grande maîtrise, elle donne de l'épaisseur à son univers semi-virtuel et critique notre société ultra-connectée et ses possibles dérives. A l'heure de la loi sur le renseignement, l'ambiance dystopique de ce roman ne pourra que vous parler. Je suis maintenant motivée à lire Je suis la reine dans un tout autre registre, le fantastique et l'horreur en nouvelles, qui pourrait bien plus me convenir !
Un avis chez Russkaya Fantastika
Le Vivant
d'Anna Starobinets
Editions Mirobole - Mai 2015
352 pages
Traduit du russe par Raphaëlle Pache
Papier : 22€ / Numérique : NC
Titre original : Живущий - 2011
Dommage que tu n'ais pas complètement adhéré :(
RépondreSupprimerChacun ses goûts ça reste un très bon bouquin !
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