Lune lit des nouvelles #4 : Angle Mort

Le pitch :

Angle Mort est une revue électronique de littératures de genre. Elle propose des nouvelles en ligne, inédites pour la plupart, en accès libre, d’auteurs francophones ou traduits.

Les genres couverts englobent notamment la science-fiction, la fantasy, le fantastique et le réalisme magique, mais la qualité des textes prime sur les conventions et étiquettes.

Angle Mort ambitionne d’explorer de nouveaux supports électroniques et d’exploiter des technologies numériques comme média de diffusion et outil artistique ; d’ouvrir un espace de publication électronique aux nouveaux courants littéraires et aux auteurs tant confirmés que débutants.

L’accent est mis sur des mises à jour régulières, à travers la publication fréquente de nouvelles. La formule, simple pour l’instant, est vouée à évoluer et à se développer.

La rédaction de la revue est bénévole, mais fait une de ses priorités de payer auteurs, traducteurs et illustrateurs en recherchant des fonds par de multiples moyens.

Mon avis :

Lune lit des nouvelles est une rubrique qui me permettra de regrouper des nouvelles "uniques" par thème, par éditeur ou juste comme ça si je veux d'abord.

Aujourd'hui, on va parler de la revue numérique Angle Mort qui propose notamment des nouvelles gratuites en ligne ou pour certaines carrément en epub. C'est un sacré boulot qu'abat l'équipe bénévole de cette e-revue, et vous pouvez les soutenir en achetant les numéros complets d'Angle Mort, à 2.99€, qui incluent un édito, les nouvelles et une interview de chaque auteur.

J'ai donc lu 4 de la quinzaine de nouvelles disponibles en téléchargement gratuit. J'en ai aimé certaines, suis restée hermétique à d'autres. Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce sont des lectures assez exigeantes. 

Ordre de présentation : de celle que j'ai le moins apprécié à celle que j'ai préféré. Comme d'habitude, les titres sont cliquables pour aller télécharger les nouvelles.

Dieu, vu de l'intérieur de Jean-Claude Dunyach

Je suis restée à l'extérieur de Dieu, vu de l'intérieur. Mais alors complètement. Pourtant elle aurait dû me parler, avec cette femme enceinte. Mais non, on est (pour moi) bien trop dans la hard-science. Cette scientifique, enceinte donc, découvre avec son petit ami, scientifique lui aussi mais plutôt dans l'informatique alors qu'elle a l'air d'être dans l'astronomie, une singularité énorme, un genre de nuage dans l'espace, qui semble sur le point de partir. 

Toute la nouvelle se déroule autour de la grossesse de la femme et de ce fameux nuage. Est-ce une intelligence extra-terrestre ? Est-ce Dieu ?

Quoiqu'il en soit, le lecteur trouvera beaucoup de termes techniques, découvrira l'intérieur, non pas de Dieu, mais d'un labo et son ambiance, et peut-être comme moi, restera quelque peu sur sa faim.

Dahut d'Hélène Marchetto

Il est ici question de la légende de la ville d'Ys mais vue de l'intérieur. (Oh ! Comme Dieu.) La légende raconte que la princesse d'Ys, éprise du Dieu des océans, aurait ouvert les portes des digues et permis l'engloutissement de sa cité par amour. C'est un peu l'Atlantide bretonne.

Et donc cette princesse s'appelle Dahut. La pauvre. On suit les derniers jours de sa vie. Elle explique ses raisons, ce qui la pousse à son comportement de mangeuse d'hommes (un amant par soir), les gens qu'elle aime, déteste, comment son père est devenu cupide et court après l'or, entraînant son royaume à sa perte.

C'est une nouvelle intéressante par le point de vue singulier, qui nous permet de suivre le cheminement de la pensée de Dahut, nous fait partager sa peur, ses hallucinations et sa détermination.

Cœur flétri d'Aliette de Bodard

Ce texte m'a paru original de par son contexte historique : on se retrouve ici chez les aztèques. Une jeune vierge est sacrifiée à l'Homme de Maïs, le dieu qui fait pleuvoir et pousser le maïs dans cette cité. Problème : la veille, elle s'est donnée à un soldat... Les prêtres lui arrachent donc le cœur, et c'est là que le fantastique entre en scène. Ils connaissent une formule pour que Metlicue continue à vivre, sans son coeur.

Et vivre sans cœur la fait instantanément devenir froide, sans émotion. C'est alors qu'elle se rend compte qu'elle est enceinte, et que l'Homme de Maïs n'est pas tel qu'il devrait être à cause de son offrande impure. La famine s'installe.

C'est une nouvelle à la fois violente et émouvante, qui m'a touchée en tant que femme et mère.

L'écran suivant d'André Ourednik

Voici ma nouvelle préférée des quatre. Elle est ultra-courte, ultra-percutante aussi et se compose de deux parties.

Mario et Luigi sont dans leur jeu. Seulement, ils ne comprennent pas, ça fait un bout de temps qu'ils sont au même niveau et il ne se passe rien. De temps en temps la console se met en veille, puis se rallume.

Il est étonnant de se demander ce que pensent les personnages de jeu vidéo, mais aussi où ils vont quand la console s'arrête. Ourednik nous parle "d'absence au monde", un peu comme une mort, une absence de temps. 

Le pourquoi de leur désarroi m'a mise extrêmement mal à l'aise, preuve que la nouvelle a touché son but. Pour moi, il existe plein de niveaux de lecture dans ce texte. L'interrogation sur le jeu vidéo, sur la fin (ou la suite), sur l'écran suivant... Je n'en révèle pas plus, Ourednik nous dit beaucoup de choses en peu de pages, et nous fait énormément réfléchir. Une réussite !

Pour résumer, en ouvrant ces nouvelles sur votre liseuse (elles sont aussi pour certaines disponibles en lecture en ligne), vous trouverez des textes exigeants. Elles m'ont parfois laissée en dehors, mais ont aussi su toucher leur but. A vous de tester !

Lecture n°14 dans le cadre
du challenge Je lis des nouvelles et des novellas