mardi 15 novembre 2016

L'Inclinaison de Christopher Priest

"Quand on voyage, on emporte ses espoirs avec soi, ses préjugés, sa propre vision de la normalité. On voit ce que l'on voit à travers des yeux formatés chez soi."

L'Inclinaison est un roman de Christopher Priest publié chez Denoël dans la collection Lunes d'encre. Il fait partie des récits se passant dans L'Archipel du rêve. Distorsion temporelle, descente aux enfers et voyages plein de langueur sont au rendez-vous dans cet étrange mélange entre dystopie et récit de voyage.

Compositeur de musique renommé, Alesandro Sussken est né dans un pays en guerre, clos, dirigé par une impitoyable junte militaire. Parti au front, son frère Jacj n’est jamais revenu. Un jour, on propose à Alesandro une tournée de neuf semaines dans certaines îles de l'Archipel du Rêve, dont la volcanique Temmil, sur laquelle vit And Ante, un guitariste de rock qu’Alesandro considère comme un plagiaire éhonté.
Cette tournée, aux distorsions temporelles incompréhensibles, va changer la vie d’Alesandro d’une façon inattendue. Il va tout perdre : sa femme, ses parents, sa liberté. Pour comprendre sa descente aux enfers, il n’aura pas d’autre solution que de retourner dans cet Archipel du Rêve, aussi séduisant que dangereux…
 

Encore une fois, je sors enchantée d'une lecture Priestienne. L'Inclinaison est un roman étrange, qui mêle la dystopie et le récit de voyage d'une façon improbable mais qui fonctionne.

Alesandro est né dans un pays en guerre, la Glaund. Froid, hostile, le climat de la Glaund est aussi joyeux que son gouvernement totalitaire engagé dans une guerre sans fin. Le frère d'Alesandro, Jacj, est parti avec le 289è régiment, et semble ne jamais devoir revenir. De son côté Alesandro va devenir un compositeur connu, inspiré par les îles de l'Archipel du Rêve qui se trouvent juste en face de la Glaund. Il aura la chance d'aller faire une tournée dans les îles et de découvrir enfin l'Archipel et ses particularités, notamment temporelles.

L'Inclinaison est un roman typiquement Priestien. On y retrouve les thématiques favorites de l'auteur : le double (le frère disparu, le plagiaire de la musique de Sandro), l'Archipel du Rêve et ses îles à la temporalité capricieuse, la guerre, la place de l'art et de la culture. Le personnage principal subit sa vie, il met du temps à prendre des décisions... Quant au lecteur, il est fasciné par le mélange improbable de voyage, de mystère et de dystopie que lui offre l'auteur. 

Je dois dire que j'ai beaucoup apprécié cette lecture. Le rythme m'a plu, tout comme l'intrigue. J'ai eu l'impression de naviguer dans l'Archipel du Rêve, de sentir le soleil des îles ou le froid glacial de la Glaund. J'ai tremblé devant la Generalissima et questionné la réalité comme Sandro : comment peut-on perdre du temps objectif de sa vie juste en voyageant entre des îles ?

Pour résumer, L'Inclinaison de Christopher Priest chez Denoël dans la collection Lunes d'encre est un roman mêlant dystopie et récit de voyage. Le roman est lent (cela peut être un atout ou un défaut, selon ce que vous aimez) et fascinant. A l'instar du narrateur, le lecteur fait un voyage à la fois sombre et lumineux. Mais n’espérez pas tout comprendre et acceptez de lâcher prise, car Priest fait ici du Priest, pour le plus grand bonheur de ses fans. 
 

L'Inclinaison 
de Christopher Priest
Denoël - Lunes d'encre - Octobre 2016
400 pages
Traduit de l'anglais par Jacques Collin
Papier : 23€ / Numérique : 16,99€
Titre original : The Gradual - 2016

 

8 commentaires:

  1. Il me fait un peu peur ce dernier Priest. L'adjacent m'avait laissé un sentiment mitigé. Les thématiques deviennent de plus en plus "littérature blanche" et ce n'est pas forcément ce que je recherche.
    Je vais faire comme le narrateur, prendre mon temps pour me décider.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est vrai que si tu n'as pas apprécié L'Adjacent :/
      Moi j'adore Priest.
      Je te conseille, si tu ne l'as pas lu, L'Été de l'infini chez Le Bélial !

      Supprimer
    2. J'ai lu tous les priest et je suis fan, mais là...
      D'accord avec toi, L'été de l'infini est excellent ainsi qu'un travail éditorial a salué.

      Supprimer
    3. Même si L'Inclinaison a un côté onirique et lent, il reste plus accessible que L'Adjacent, notamment parce que le personnage principal est toujours le même.
      (travail éditorial mémorable pour L'Été de l'infini en effet)

      Supprimer
  2. Bon, bon si cela vire littérature blanche, je ne suis pas forcément tentée. Je vais lorgner du côté de l'été de l'infini.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Si tu n'as jamais lu Priest, je te conseille de commencer par Le monde inverti. Et l'Eté de l'infini est génial, notamment grâce au travail éditorial comme l'a dit le Chien critique, et aussi par l'essai sur l'adaptation au cinéma du Prestige (un film que j'adore, j'ai lu le roman ensuite).

      Supprimer
  3. A chaque nouveau roman de Priest, je me dis qu'il faut que je le lise, et à chaque fois je retarde... Je vais essayer de faire un effort sur celui-là.

    RépondreSupprimer
  4. Ce n'est pas le roman "priestien" que je préfère mais il reste de bonne facture. Si le temps était distordu à souhait par l'auteur, j'aurai aimé des liens plus forts entre temps et tempo.

    RépondreSupprimer

Pages vues