Images fantômes est un roman atypique d'Elizabeth Hand, publié chez Super 8. Annoncé comme un texte inquiétant, il l'est effectivement, mais son rythme en fait une sorte d'OLNI qui ne conviendra pas à tout le monde... Le très peu d'éléments fantastiques pouvant résulter de visions de la narratrice, vous avez plutôt affaire à un mix de thriller et de nature writing !
Photographe
punk expérimentale, adepte made in NYC des ambiances morbides et de la
déglingue radicale, Cass Neary a connu son quart d’heure de gloire
warholien. Ce qui n’était pas prévu, c’est qu’elle y survive. Vingt ans
plus tard, c’est une quadragénaire has been ayant gardé de sa folle
jeunesse, outre un penchant prononcé pour les paradis artificiels, une profonde et incurable nostalgie. Aussi, quand son vieil ami Phil lui propose d’aller interviewer
Aphrodite Kamestos, artiste culte des années 1960 vivant désormais
recluse sur une petite île perdue au large du Maine, Cass n’hésite pas
très longtemps ; d’autant que Kamestos, dont l’œuvre a inspiré son
propre travail, a apparemment demandé à la voir personnellement. Mais le
Maine en novembre est un monde en soi : grise, glacée, peuplée de
figures inquiétantes, la région baigne dans une atmosphère quasi
onirique, et l’esprit embrumé de la visiteuse n’arrange rien à
l’affaire.
Images fantômes, c'est l'histoire de Cass, une photographe qui a eu son heure de gloire une vingtaine d'années auparavant en immortalisant des cadavres... Un style bien particulier pour une punk à la vie difficile, droguée et alcoolique. Quand un ami lui demande d'aller interviewer l'une des photographes qui l'a influencée dans sa jeunesse, elle accepte d'aller se perdre dans le Maine (aussi parce qu'elle est complètement fauchée). En arrivant elle découvre un endroit et des gens pas très accueillants, et des disparitions étranges.
J'ai écrit un statut sur la page FB du blog pour ce titre, qui résume finalement bien l'impression qu'il me laisse : Images fantômes d'Elizabeth Hand. Passionnant en terme de culture photo.
Chiant en terme d'intrigue. Superbe atmosphère à la David Vann. Se
passe rien avant la page 246. Sur 421 pages. Voilà.
En terme de culture photographique (ou pas, juste des artistes et penseurs des années 60/70, dans la jeunesse de Cass, la narratrice), c'est bourré de références. Alors évidemment j'en connais certaines, comme Mapplethorpe ou Roland Barthes, et d'autres moins. On rentre un peu dans la tête de la photographe, on parle angle de vue, techniques photo, appareils et leurs évolution (Cass est définitivement réfractaire au numérique et continue d'utiliser son argentique et à développer ses photos elle-même) ainsi que d'intuition et de capturer LE moment. On se remémore les communautés d'artistes hippies... Je dois dire que cet aspect du livre est enrichissant et très intéressant.
Polaroïd de Mapplethorpe |
Autre grande qualité de ce livre, son décor. L'auteure l'annonce dès le départ dans sa dédicace : "A David Streitfeld, qui me réclamait une chronique du Maine". On connait souvent le Maine à travers les yeux de Stephen King, ce qui fait que le côté inquiétant et peu avenant des habitants n'est pas surprenant. Par contre il faut avouer qu'Elizabeth Hand a un talent fou pour poser son atmosphère : c'est beau, c'est froid, c'est humide, c'est hostile... En plus on finit par aller carrément sur une île et se retrouver en huis-clos avec les insulaires. J'ai pensé à David Vann, je vous laisse imaginer l'ambiance.
La narratrice quant à elle, est assez particulière. Photographe punk tombée dans l'oubli, la vie ne l'a pas épargnée. Elle se drogue dès que possible et tient avec des médocs. Elle est aussi un peu kleptomane et trèèèès curieuse. Elle n'hésitera pas à fouiner partout où elle ira. Un personnage fort qui ne se laisse pas faire mais aussi dérangeant et loin d'être un modèle. Une anti-héroïne.
Finalement, le gros défaut de ce roman est le rythme de l'intrigue. Autant l'on est bien pris par la gouaille de la narratrice, autant il ne se passe pas grand chose avant le dernier tiers, voire le dernier quart du récit. Alors bien évidemment, cela sert la mise en place de l'atmosphère, mais le lecteur peu intéressé par la photo ou les paysages du Maine va vite s'ennuyer avec cette intrigue un peu lèg' comme on dit.
Une île du Maine |
Finalement, le gros défaut de ce roman est le rythme de l'intrigue. Autant l'on est bien pris par la gouaille de la narratrice, autant il ne se passe pas grand chose avant le dernier tiers, voire le dernier quart du récit. Alors bien évidemment, cela sert la mise en place de l'atmosphère, mais le lecteur peu intéressé par la photo ou les paysages du Maine va vite s'ennuyer avec cette intrigue un peu lèg' comme on dit.
Pour résumer, Images fantômes est un roman atypique d'Elizabeth Hand, édité par Super 8. C'est un excellent livre par ses aspects culturels et son décor, son atmosphère. Par contre le rythme de l'intrigue est inégal et les choses sérieuses ne commencent que dans le dernier tiers de l'histoire. Voici un mix de thriller et de nature writing qui aurait aussi bien pu être publié en littérature générale. A vous de voir s'il peut vous convenir, pour ma part je reste mitigée, même une semaine après l'avoir terminé : subjuguée par le décor et l'ambiance, intéressée par les références, presque ennuyée par l'intrigue et son rythme mollasson. C'est le premier tome d'une trilogie mais il peut se lire comme un one-shot.
d'Elizabeth Hand
Super 8 éditions - août 2016
434 pages
Traduit de l'américain par Brigitte Mariot
Papier : 19€ / Numérique : 12,99€
Titre original : Generation loss - 2007
Je note le titre dans un coin si j'ai envie d'un roman qui parle photo (mais du coup pas la peine de le mettre en tête de liste !)
RépondreSupprimerPour l'ambiance et le côté artistique, ça peut valoir le coup !
SupprimerÇa me semble un peu trop contemplatif pour moi, en plus, tu l'as taggué "nature writing" et souvent, ça m'ennuie...
RépondreSupprimerça vaut beaucoup par ses références artistiques et son atmosphère, mais je dois dire que ce n'est pas mouvementé en effet.
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