dimanche 27 septembre 2015

Nouveau modèle de Philip K. Dick

Quand j'étais ado, j'ai vu un film canado-américano-japonais (!) de SF réalisé par Christian Duguay qui s'appelait Screamers (Planète hurlante en VF). Il est sorti en 1995. Il est inspiré d'une nouvelle de P.K. Dick parue en 1953 et intitulée Nouveau modèle. Il m'avait bien foutu les jetons ! Suite à une chronique de Vert sur le film, je me suis penchée sur le texte, publié chez Folio SF dans le recueil Minority report / Total recall (C'est le  même recueil, Folio a juste changé le titre à la sortie du remake de Total recall).

Dans une planète décimée par l'affrontement entre américains et russes, les troupes des deux camps se réfugient dans des bunkers. Des robots conçus par les Américains pour tuer les hommes - les griffes - sillonnent la surface de Terra. Les Russes proposant un armistice devant la menace implacable de ces nouvelles armes, les américains envoient un émissaire pour négocier avec les ennemis survivants. Ceux-ci lui apprennent que les griffes ont évolué d'elles-mêmes, ont pris apparence humaine pour mieux remplir leurs missions, qu'il en existe de nombreux modèles et surtout, que pour ces griffes humanoïdes, tout être humain est l'ennemi.

Contrairement au film, où deux factions humaines s'affrontent sur une planète lointaine, dans la nouvelle l'action se passe sur Terre, alors que la Guerre Froide a littéralement pété à la tronche de tout le monde. (Mais en 1995, date de réalisation du film, la Guerre Froide c'était un peu dépassé, alors ils avaient resitué l'action dans l'espace).

En Normandie donc, les Russes et les Américains ne s'entretuent plus vraiment les uns les autres : en effet une arme moderne inventée par les américains tue les russes. Ce sont les Griffes (screamers ou hurleurs dans le film), des robots tueurs enfouis dans le sol. Imaginez une scie circulaire qui sortirait du sol pour vous découper en morceaux, fun non ? Mais maintenant ces robots se construisent tous seuls, évoluent, et rusent pour tuer les humains, quel que soit leur camp...

"- Ce ne sont que des machines investies d'une mission unique.
- Pour le moment, certes. Mais à l'avenir ? Quand la guerre sera terminée ? Peut-être leurs véritables potentialités émergeront-elles lorsqu'il n'y aura plus d'humains tuer.
- Vous parlez comme si elles étaient vivantes !
- Ne le sont-elles pas ?"

Un soldat américain part négocier avec les russes, et se rend compte qu'il n'y en a plus beaucoup avec qui négocier. Il fait aussi la rencontre du nouveau modèle de griffes...

Dick critique ici non seulement la Guerre Froide (sa femme, enfin celle de l'époque, était d'ailleurs fichée au FBI pour "communisme"), mais aussi les armes, menaces qui peuvent bien souvent se retourner contre leur créateur. En bon geek, on pense immanquablement à Skynet et Terminator, qui sont venus bien après... L'auteur s'interroge finalement sur ce que c'est d'être humain, sur ce qui définit l'humanité.

"Je me demande si nous n'assistons pas à la naissance d'une nouvelle race.
De la nouvelle race. L'évolution en marche, l'espèce qui succèdera à l'homme."

 
Avec une atmosphère post-apocalyptique des plus angoissantes qui m'a rappelé une autre nouvelle de l'auteur, Petit déjeuner au crépuscule (à lire !), Nouveau modèle est efficace et rappelle s'il est besoin que Dick était un excellent nouvelliste.

Pour résumer, Nouveau modèle de Philip K. Dick est une excellente nouvelle de SF, dont le contexte un peu daté n'empêche en rien l'angoisse et l'horreur de s'installer, et le lecteur de saisir les interrogations et critiques de l'auteur. Et puis les robots tueurs sont d'actualité, entre les drones de combat et les IA guerrières redoutées par Stephen Hawking, et notre imaginaire collectif (merci Terminator)... Une nouvelle à lire dans le recueil Minority report / Total recall (C'est le  même recueil, Folio a juste changé le titre à la sortie du remake de Total recall).


La chronique de Vert qui m'a poussée à lire cette nouvelle.




Le Fossoyeur de films en parle très bien ;-)

Nouveau modèle
de Philip K. Dick
Folio SF dans le recueil Minority report / Total recall
69 pages
Traduit de l'américain par Hélène Collon en 2000
(avait déjà été traduit en 1975 par Mary Rosenthal)
Papier : 8,10€ (pas de version numérique)
Titre original : Second variety - 1953

7 commentaires:

  1. La couverture que tu as déniché est fort appropriée !

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  2. Le film est plutôt plaisant (enfin entendons-nous ...) et fonctionne encore à l'heure actuel (vu pour la première fois il y a un an ou deux). Pas lu la nouvelle mais tout ceci est fort alléchant.

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  3. @Vert : oui je trouve aussi !

    @Tigger : la nouvelle est chouette même si le contexte étonne quand on la lit après avoir vu le film !

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  4. J'avais bien aimé la nouvelle (lue dans l'intégrale chez Lunes d'Encre). Par contre, sacrilège, je n'ai pas vu le film !

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  5. @Lorhkan : il va falloir réparer ça !

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  6. Ni vu, ni lu ! Et pourtant j'aime bien ce que fait le monsieur, ça fait bien longtemps que j'ai rien lu de lui, donc à réparer sous peu !

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  7. @Raven : ses nouvelles sont toujours un plaisir, j'ai plus de mal avec certains de ses romans.

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