Les Années fléaux est un recueil original de trois nouvelles de Norman Spinrad, initialement paru dans la collection Présence du Futur, puis réédité par Folio SF.
Ayant redécouvert il y a peu l'auteur grâce à la nouvelle Continent perdu parue chez les Dyschroniques, j'avais envie de creuser un peu sa vision de l'apocalypse. J'avais précédemment lu Rêve de fer, dans un tout autre registre.
Dans les rues et le métro de New York devenus une vaste Cour des
Miracles s'engage une poursuite impitoyable entre une transfuge du
trottoir promue vigile et un zonard sans pitié pour la possession...
d'un chien. C'est l'Amérique du chômage.
Les ravages du sida ont transformé des villes entières en Zones de Quarantaine où l'ont laisse mijoter le virus, situation qui arrange les instances politiques et économiques et que la découverte d'un remède ne saurait changer. C'est l'Amérique de l'exclusion.
Le pouvoir mis en place par la « majorité morale » post-reaganienne contraint à l'exil les mauvais esprits du genre de Normal Spinrad, qui se retrouve sur ses vieux jours en train de jouer une nouvelle version d'Un Américain à Paris. C'est l'Amérique de la censure.
Les ravages du sida ont transformé des villes entières en Zones de Quarantaine où l'ont laisse mijoter le virus, situation qui arrange les instances politiques et économiques et que la découverte d'un remède ne saurait changer. C'est l'Amérique de l'exclusion.
Le pouvoir mis en place par la « majorité morale » post-reaganienne contraint à l'exil les mauvais esprits du genre de Normal Spinrad, qui se retrouve sur ses vieux jours en train de jouer une nouvelle version d'Un Américain à Paris. C'est l'Amérique de la censure.
Spinrad est un auteur américain très critique à l'égard de son pays. Le monsieur ne mâche pas ses mots, et cela ne plait pas à tout le monde. Il est souvent censuré a priori (par son agent, son éditeur... notamment pour le roman qu'il souhaitait écrire autour de la seconde nouvelle de ce recueil, une Amérique dévastée par le SIDA) ou décrié voire censuré a posteriori. Il finit même par déménager à Paris dans les années 80. Un de ses derniers romans, Oussama, a été publié en France, mais pas dans les pays anglo-saxons.
Ces trois nouvelles sont assez longues, et j'ai vraiment beaucoup aimé les deux premières. La troisième a un thème intéressant, la censure, et qui touche Spinrad de près, mais je n'ai pas du tout accroché.
Chair à pavé est un texte qui m'a fait penser à Soleil Vert (en meilleur et plus court), mais aussi à Continent perdu, notamment avec sa visite du métro New-yorkais. Dans ce texte, l'Amérique est divisée en deux : d'un côté les Bourges qui sont riches, très peu nombreux et se partagent les ressources. De l'autre les Zonards, qui vivent dans la rue et mangent du rat quand ils ont de la chance, et sont rationnés grâce à des cartes pour lesquelles ils n'hésitent pas à s'entretuer. Le fichage est d'ailleurs un thème qui revient dans la nouvelle suivante. Entre eux, la police, constituée d'anciens zonards sortis de la misère pour obéir aux ordres parfois insensés des Bourges.
Nous allons suivre deux personnages dans une course-poursuite mortelle : un homme zonard et une femme policière, ancienne zonarde. Elle s'occupe d'une Bourge qui décide d'atterrir en hélico dans un coin pauvre de NY pour faire pisser son chien, qui évidemment s'échappe. Lui récupère le chien qui s'est échappé (40 kilos de bidoche !!) et s'enfuit. Elle va recevoir l'ordre idiot de le poursuivre et de ramener le chien.
Une nouvelle plus courte que les deux autres, qui se lit bien, qui aborde la paupérisation de l'Amérique, les richesses qui sont détenues par une minorité, le fichage, et la bestialité de l'homme dans cette jungle urbaine. Très bon texte.
Chroniques de l'Âge du Fléau est la nouvelle dans laquelle j'ai eu le plus de mal à rentrer mais s'est révélée être ma préférée du recueil. Elle a été écrite dans les années 80.
Spinrad imagine une Amérique dévastée par une épidémie de SIDA. C'est là que j'ai eu du mal à suspendre mon incrédulité. Certes, l'épidémie est terrible dans certains pays, notamment en Afrique. Mais les Etats-Unis sont un pays développé dans lequel un certain nombre de personnes sont suffisamment à l'aise pour acheter des préservatifs. Au lieu de cela, Spinrad invente des machines qui permettent de faire l'amour, ou encore des sexomatons pour se soulager en toute sécurité. Cependant dans les années 80 le SIDA était un peu une fin du monde, d'où cette vision je suppose.
J'ai eu du mal mais finalement je suis passée outre, car j'ai été happée par la construction et finalement le contenu du texte. L'auteur a imaginé des chroniques retrouvée après l'Âge du Fléau, et écrites par divers personnages vivant dans cette Amérique où chacun est fiché (carte bleue : personne saine / carte noire : personne malade, arrêtée pour être parquée dans une Zone de Quarantaine). On y rencontre un militaire psychopathe atteint du SIDA, une jeune femme qui se fait contaminer par son petit ami et fugue, un médecin généticien trouillard mais brillant, le créateur et président bigot des Zones de Quarantaine.
Spinrad nous parle des chrétiens radicaux de son pays et de leur point de vue étriqué, des patrons de multinationales pharmaceutiques pourris, de la peur de cette jeunesse face à une épidémie qui se transmet par l'acte le plus naturel qui soit, de la frustration des gens face à l'impossibilité d'accomplir cet acte sans protection et sans avoir peur de mourir, de la déliquescence d'un pays qui rejette ses malades et les laisse crever dans le caniveau en disant que ce sont des pervers et que ce ne peut être que de leur faute. En bref un texte puissant, renforcé par sa construction sous forme de chroniques.
Enfin la dernière nouvelle, La vie continue m'a beaucoup moins plu. Spinrad prévient, c'est une autofiction, et déjà ça ne plait pas à tout le monde. Personnellement ça ne me dérange pas, par contre je me suis ennuyée. Ces histoires de contrats, d'impôts, etc ne m'ont pas emballée. Cependant à travers ce texte, l'auteur se permet de critiquer la censure et l'administration de son pays, qui pourrait bien dériver vers le fascisme, pour peu qu'une œuvre la critique ou ne lui plaise pas.
Pour résumer, Les Années fléaux de Norman Spinrad est un recueil original de trois longues nouvelles publié chez Folio SF. Il aborde des thèmes polémiques chers à l'auteur tels que le fichage, la censure, le SIDA (à plus forte raison dans un pays hautement religieux), la liberté de mœurs (idem). Il fait plus qu'égratigner son pays, les États-Unis, dans ces textes violents et percutants.
Effectivement, ça sonne comme du Spinrad pur jus, dur, engagé, et qui ne prend pas de gants pour dénoncer certaines choses à la face du lecteur ! :D
RépondreSupprimerJe ne connaissais pas ce recueil en tout cas, bonne pioche on dirait ! ;)
Je me demande si je ne l'ai pas lu celui-là, parce que je me souviens de la nouvelle sur le SIDA qui m'a beaucoup marqué.
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