↓ Inspection de Josh Malerman

Inspection est une dystopie de Josh Malerman parue chez Calmann Lévy dans la collection Noir. J'avais beaucoup aimé Bird box du même auteur et me suis donc penchée sur ce nouveau roman.

Et je dis non. Nope. Lisez Bird box parce que là je sais pas ce qu'il s'est passé...

Il existe une école isolée dans la forêt, coupée du reste du monde.
Là-bas, vingt-quatre garçons, tous orphelins, sont formés à devenir des génies, sans jamais qu’on leur dévoile l’existence du sexe opposé.
J est le seul élève persuadé qu’on leur cache quelque chose.

De l’autre côté de la forêt, dans une école en tout point similaire, K, orpheline élevée exclusivement entre filles, se pose elle aussi des questions.
Mais quel est le but des adultes qui dictent les règles de ces instituts ?
J et K mènent l’enquête, chacun de leur côté.
Ils vont se trouver.
Et révéler les horribles secrets de leur univers clos.

Les blurbs disaient « Le croisement improbable de 1984 et de Sa Majesté des mouches» ou encore «Effrayant... Une intrigue plus suffocante et perturbante que celle de Bird Box, mais aussi plus ambitieuse»  (le Washington post pour celle là quand même) encore une preuve que les blurbs c'est de la crotte en barre parfois. Souvent. Parce que Bird box, c'est mille fois meilleur.

Donc, en gros, on a deux tours. Dans une, 26 garçons élevés en vase clos, sans savoir que le sexe opposé existe. Dans l'autre, 26 filles, pareil. Un endoctrinement, une surveillance de chaque instant, zéro contact avec le monde réel, du personnel du même sexe embauché tout exprès, et la menace du Coin, parce que quand on devient "pourris-gâtés" on va au Coin et on en revient jamais. C'est pour ça que 12 ans après le début de l'expérience, il manque deux garçons et une fille.

Tout cela est tenu d'une main de fer par P.E.R.E et M.E.R.E. Les gamins sont inspectés tous les matins, on leur prédit des maladies horribles s'ils ne sont pas totalement coopératifs et purs. Que du bonheur quoi. Malgré ça ils sont apparemment assez épanouis pour être devenus des génies.

L'idée en elle-même est invraisemblable.  

D'abord beaucoup trop de personnes sont au courant : le personnel ET les parents qui ont vendu leurs gosses. Mais bon zéro fuite t'inquiète. Les tours, elles sont immenses, et même cachées dans la forêt ben désolée mais Google Earth quoi. Les drônes. Tout ça. (C'est en 2019 je précise, l'année aurait pu être indéterminée mais non). Certains parlent de 1984 et de Sa majesté des mouches, chacun ses références je vais vous parler de Jarod, le caméléon... C'est un peu la même idée, développer les capacités d'un gamin pour un jour pouvoir agir sur le monde extérieur, sans lui dire pourquoi il fait ci ou ça. Bon mettons, on suspend notre incrédulité parce qu'on est gentil.

On en vient donc au but de cette petite expérience : prouver que le sexe opposé est une distraction qui empêche chacun de réaliser son potentiel et de développer son intelligence. Et là je dis WHAT THE FUCK. Impossible d'adhérer à cette histoire de sexe opposé ! Le truc est tellement hétérocentré que même moi qui suis hétéro, j'ai halluciné. 

Déjà l'auteur nie toute exploration sexuelle avant 12 ans (désolée, hein, mais votre corps n'attend pas l'adolescence pour ressentir des choses, c'est la vie, et ça commence très tôt), ensuite il nie toute possibilité d'autosexualité et d'homosexualité : l'auteur n'en parle même pas ! Les filles, ça distrait les garçons, les garçons ça distrait les filles, point. Donc s'ils sont séparés, pouf l'amour et la sexualité disparaissent, abracadabra c'est magique. Sincèrement je sais pas quoi dire de plus. Si à la limite, l'auteur finissait par prouver par A + B que c'était un biais de ceux qui ont organisé l'expérience et qu'ils ont rien compris à la vie, OK, mais non le gars va jusqu'au bout de son idée.

Alors qu'on soit bouleversé de découvrir qu'il existe un autre sexe alors qu'on ne pensait être que soi et que les petits garçons poussaient dans les arbres (véridique), je comprends totalement. Mais non le reste n'a pas de sens. Enfin au moins, à la fin, on découvre qu'iels sont tous SPOILER sociopathes FIN DU SPOILER, et ça au moins, ça semble légitime.

Oh, et à un moment, l'auteur nous offre un chapitre dans lequel c'est une femme célibataire qui parle, elle essaie de faire une soirée avec ses amies mariées, mais selon elle, elles ne se lâchent pas, bref gros jugement sur le choix de vie dont je crois qu'il se voudrait comme qui dirait féministe. Humpf loupé. Je ne vous parle pas de l'emploi du mot hystérique pour qualifier uniquement les filles dans leur tour évidemment. Les garçons eux sont juste turbulents, chacun sa place aussi.

A noter, une traduction pas toujours au top, avec isolation au lieu d'isolement, sûrement une traduction littérale, et puis l'emploi du "ils" pour l'équipe pédagogique chez les filles qui ne connaissent normalement pas ce pronom, mais c'est peut-être une coquille. 

Même le petit clin d'oeil à Huxley via le pseudo de l'écrivain attitré des garçons, Luxley, m'a semblé poussif.

Quoiqu'il en soit, passez votre chemin. Ce roman n'a aucun début de queue ni de tête. Lisez 1984, Sa majesté des mouches, Le Meilleur des mondes, ou encore La maison dans laquelle et puis Bird box, mais laissez tomber Inspection.

Inspection
de Josh Malerman
Calmann Lévy Noir - Octobre 2020
464 pages
Traduit par Sébastien Guillot
Papier : 21,90€ / Numérique : 15,99€
Titre original : Inspection - 2019