"Amplifiée
par les haut-parleurs, la voix de Malcolm portait loin dans le no man's
land. Les mots franchissaient la ligne de blindés, immobiles et noirs
comme de gros scarabées morts, pour aller s'écraser sur les murailles
aveugles de la forteresse du Peuple Sain :
- Enfants du chaos, fils du désastre, sommes-nous condamnés à survivre dans l'effroi éternel pendant que les rescapés du Feu Nucléaire nous narguent dans les forteresses du Peuple Sain ? Quel Dieu a décidé qu ils pouvaient vivre et nous mourir ? Dans quel livre sont écrites ces lois ? Quelle Science soigne les uns et tue les autres ? Ils sont là-bas, derrière leurs murs ! Ils nous méprisent ! Ils nous ignorent ! Parmi nous, il y a peut-être leur frère, leur sœur, leurs enfants, mais ils ne veulent pas nous voir ! Ils ne veulent pas m'entendre mais je suis l'écho sans fin de l'onde de choc qui va détruire tous les murs !"
- Enfants du chaos, fils du désastre, sommes-nous condamnés à survivre dans l'effroi éternel pendant que les rescapés du Feu Nucléaire nous narguent dans les forteresses du Peuple Sain ? Quel Dieu a décidé qu ils pouvaient vivre et nous mourir ? Dans quel livre sont écrites ces lois ? Quelle Science soigne les uns et tue les autres ? Ils sont là-bas, derrière leurs murs ! Ils nous méprisent ! Ils nous ignorent ! Parmi nous, il y a peut-être leur frère, leur sœur, leurs enfants, mais ils ne veulent pas nous voir ! Ils ne veulent pas m'entendre mais je suis l'écho sans fin de l'onde de choc qui va détruire tous les murs !"
Mon avis :
Le monde a commencé avant l'homme, il s'achèvera sans lui
Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques
Cet exergue résume bien Loco, le dernier roman de Joël Houssin, publié par les Editions Ring et préfacé par Maurice Dantec. C'est un post-apo que je qualifierais d'assez trash. Il s'agit de la réécriture de Locomotive Rictus, publié en 1975.
Dans un monde post-apocalyptique, après une catastrophe nucléaire et chimique, les survivants sont scindés en deux groupes : d'un côté le Peuple Sain, enfermé dans des cités soit-disant inviolables, vivant en vase clos dans une atmosphère stérile, passant sa vie oisive à se divertir de toutes les manières possibles, souvent perverses, et dont le taux de suicide est extrêmement élevé (donc finalement ils ne sont pas tous si insensibles). De l'autre, à l'extérieur, soumis à tous les virus, toutes les substances mortelles possibles et inimaginables, on trouve les contaminés. Mutants, atteints de maladies, malformations, etc... Leurs gangs sont dirigés par Malcolm. Il est résolu à exterminer le Peuple Sain.
Je vais commencer par dire que ce livre est bien écrit et construit. L'histoire est fluide, on ne s'ennuie pas, et on en prend plein la tronche (oui je suis polie, je ne dis pas plein la gueule, mais c'est ce que je pense).
La base du récit reste assez classique : dans un monde détruit, des contaminés décident de se révolter contre les gens en bonne santé qui n'en ont franchement rien à péter d'eux, et s'en servent même pour des expériences, voire pour leur divertissement, et enlevant leurs "femelles". Rien ici de révolutionnaire au pays du post-apo. Des mutants se baladent, ils peuvent avoir deux têtes, les yeux jaunes, les dents pointues, ou se décomposer sur place du fait des nombreuses maladies qu'ils se trimballent.
Malcolm connaissait les Rôdeurs à deux têtes. L'une des têtes pensait, prenait des décisions,
l'autre crachait à plus de dix mètres un venin neurotoxique.
l'autre crachait à plus de dix mètres un venin neurotoxique.
Mais alors comment se distingue ce court roman ? Tout simplement par sa trashitude, qui est la marque de Joël Houssin. Âmes sensibles s'abstenir.
Précédemment, j'avais lu avec le Cercle d'Atuan Le Temps du twist, auquel je n'avais pas accroché plus que ça. Ici je retrouve avec plaisir l’ultra-violence découverte dans Dobermann (le film) et c'est assez jouissif. Oui, il y a du gore dans ce bouquin ! On y tue, massacre, écorche vif, viole une femme contaminée pour se suicider, mutile une autre dans son intimité (petit clin d’œil à Vian je suppose), certains appellent "lait" le sperme, et en font l'usage qu'on réserve en effet au lait... Toutes les drogues imaginables existent et circulent. Je vous en passe et des meilleures (enfin des pires).
- Va pas à la manif petit. Tu vas mourir pour rien.
- On meurt pas pour rien ici, on vit pour rien.
Précédemment, j'avais lu avec le Cercle d'Atuan Le Temps du twist, auquel je n'avais pas accroché plus que ça. Ici je retrouve avec plaisir l’ultra-violence découverte dans Dobermann (le film) et c'est assez jouissif. Oui, il y a du gore dans ce bouquin ! On y tue, massacre, écorche vif, viole une femme contaminée pour se suicider, mutile une autre dans son intimité (petit clin d’œil à Vian je suppose), certains appellent "lait" le sperme, et en font l'usage qu'on réserve en effet au lait... Toutes les drogues imaginables existent et circulent. Je vous en passe et des meilleures (enfin des pires).
A part les enfants protégés par les gangs, ceux qui survivaient s'étaient enfuis
avant que leurs parents ne les mangent.
avant que leurs parents ne les mangent.
Cela dit, je pense que derrière la violence et l’extrémisme de ce roman, se cache une critique pour le coup hyper virulente de notre société : les pauvres au caniveau, les riches de plus en plus riches, au mieux s'amusant de la situation, au pire en profitant au maximum. Alors cette révolution lancée par Malcolm nous semble tout à coup moins lointaine, le sentiment d'exclusion des contaminés devient une réalité. Sachez que dans le roman, les personnes appartenant au Peuple Sain sortent parfois dans les quartiers extérieurs pour s'amuser, en gros détruire tout ce qu'ils trouvent. Parce qu'ils ne considèrent pas que ceux d'en face sont des êtres humains.
Bien sûr, il est clair que personne dans ce livre, d'un côté ou de l'autre de la barrière, n'est innocent.
Bien sûr, il est clair que personne dans ce livre, d'un côté ou de l'autre de la barrière, n'est innocent.
Pour terminer, je ne conseillerai pas ce roman à n'importe qui. Il faut avoir le cœur bien accroché et aimer le post-apo sale. On se rapproche du niveau de glauquitude de Plop. L'auteur va au bout de son écriture et de son propos, ne s'arrête pas à la suggestion mais au contraire, crache tout à la gueule du lecteur. Un livre qui se lit vite, bien, où l'ultra-violence côtoie la réflexion.
Petite déception d'apprendre que c'est une réécriture d'un roman que j'ai déjà lu.
RépondreSupprimerJe le prendrais quand même probablement car ça fait 15 ans que je l'ai lu.
L'univers de super noir de houssin m'a toujours plus. As-tu lu Argentine ? Je l'avais trouvé super.
Ne trouves tu pas que dans tous les romans de Houssin, c'est un peu :
- ça va très mal, très très mal
- mais ils vont y arriver
- houla ça ce corse, pas bon
- finalement, ils vont y arriver
- Ben au final, non. Ils sont tous morts
C'est clairement pas pour les dépressifs.
Non je n'ai pas lu Argentine !
RépondreSupprimerBin oui, mais en même temps, c'est le ressort scénaristique de pas mal de bouquins. Encore que là ça va mal tout le temps !
Il me le faut !
RépondreSupprimer:)